PLCI ou EIP : quel plan de pension choisir quand on est indépendant ?
4 septembre 2025
4 septembre 2025
On le sait : la pension légale des indépendants en Belgique reste faible. La plupart du temps, elle ne permet pas de maintenir son niveau de vie même après une carrière complète. C’est pourquoi l’État a créé plusieurs dispositifs de pension complémentaire, avec des avantages fiscaux à la clé.
Deux instruments en particulier dominent le paysage : la Pension Libre Complémentaire pour Indépendants (PLCI) et l’Engagement Individuel de Pension (EIP).
Tous deux visent à aider les indépendants et dirigeants d’entreprise à constituer un capital retraite dans un cadre fiscal avantageux. Mais lequel choisir ? Dans quel ordre les mettre en place ? Et surtout, à quelles conditions sont-ils réellement intéressants ?
Parce que ces questions dépassent la stricte fiscalité pour toucher à la planification patrimoniale, nous avons souhaité croiser les regards. À l’occasion d’un webinaire organisé par VIP Conseil, nous avons invité Lara Balot, consultante patrimoniale chez Agifin, à partager son expertise. Agifin est un cabinet indépendant, spécialisé dans l’accompagnement des indépendants et chefs d’entreprise pour l’optimisation financière, patrimoniale et successorale.
La Pension Libre Complémentaire pour Indépendants (PLCI) est un contrat d’épargne-pension réservé aux indépendants. Elle leur permet de constituer un capital retraite tout en bénéficiant d’un avantage fiscal important.
« Pour un indépendant en personne physique, la PLCI reste une évidence », explique Lara Balot, consultante patrimoniale chez Agifin.
« Les primes payées sont déductibles comme frais professionnels. Elles se déduisent avant le calcul des cotisations sociales et permettent donc de les diminuer. De plus, l’impôt des personnes physiques diminue aussi car le montant de la PLCI se déduit sur la plus haute des tranches à l’IPP. On peut donc atteindre une économie d’impôt de plus de 50% »
Concrètement, un versement de 4.000 € peut ne représenter qu’un effort réel de moins de 2000€ après impôts. L’effet de levier fiscal est immédiat et justifie à lui seul l’intérêt du produit, même avec un faible rendement. Par ailleurs, à la différence de l’EIP, les primes ne subissent aucune taxe d’entrée. A la sortie, il faudra toutefois compter sur une taxation sous forme de rente fictive.
Si la PLCI est particulièrement incontournable dans le cas d’un indépendant en personne physique, c’est parce qu’il supporte une charge fiscale et sociale proportionnellement plus élevée qu’un dirigeant en société, qui peut compter sur d’autres leviers de rémunération (dividendes, avantages en nature, EIP). Pour un indépendant, la PLCI est donc souvent le seul outil efficace et accessible pour alléger la pression fiscale tout en préparant sa pension.
En revanche, pour les dirigeants d’entreprise, le discours est plus nuancé. « Oui, un gérant peut souscrire une PLCI », poursuit Lara Balot. « La cotisation sera payable en personne physique ou via la société avec paiement d’un ATN. Mais le plafond d’une PLCI est limité à environ 4.000 à 4.600 € par an. À côté de ce que permet un EIP, l’impact reste marginal. Certains dirigeants préfèrent concentrer leurs efforts sur leur EIP, qui permet d’épargner et investir des montants bien supérieurs. Dans ce cas, la PLCI devient secondaire. »
L’Engagement Individuel de Pension (EIP) est un contrat d’assurance pension souscrit par une société au bénéfice de son dirigeant. Contrairement à la PLCI, il est réservé aux indépendants qui exercent via une société et qui se versent un salaire régulier. La grande différence avec la PLCI est que la prime est alors payée par la société, et déductible dans son chef. On peut donc la considérer comme un élément à part entière de la rémunération d’un dirigeant d’entreprise.
Les primes sont taxées à 4,4%, et l’EIP sera également taxé à la sortie. « On résume souvent à nos clients que pour 100€ investis, on compte 80€ nets touchés à la pension », explique Lara Balot. « Cela comprend une taxe à la sortie et divers frais et commissions – donc un total d’environ 15% à déduire si l’EIP est perçu à 67 ans. »
« Lorsqu’il est possible, l’EIP est un outil beaucoup plus puissant que la PLCI. Selon la situation, l’indépendant peut ainsi placer des montants beaucoup plus élevés, surtout en cas de back-service (c’est-à-dire une prime de rattrapage permettant de régulariser des années passées) tout en restant fiscalement déductibles pour la société. »
Cependant, ces montants sont plafonnés par la règle des 80 %. Celle-ci impose que la pension totale ne puisse pas dépasser 80 % de la dernière rémunération brute annuelle normale du dirigeant, calculée jusqu’à l’âge légal de la pension. Le calcul tient aussi compte de la durée de carrière ainsi que de la situation familiale.
Ce plafond dépend donc :
« Cela ne laisse souvent pas assez de place pour l’EIP », continue Lara Balot. Et si l’indépendant a déjà bénéficié d’une assurance-groupe intéressante en tant qu’employé, cela limite encore la marge possible. « Dans ce cas, l’EIP ne sera pas intéressante, et il vaudra mieux se tourner vers une PLCI. »
Un autre avantage de l’EIP : sa flexibilité.
« On dit souvent à nos clients : « même si vous cotisez pour votre retraite, vous verrez peut-être cet argent bien avant. C’est grâce au fait que l’EIP peut aussi servir pour un achat immobilier. Il peut être avancé à hauteur de 65 à 75% selon les compagnies d’assurance, afin de financer un achat immobilier. Jusqu’ici, cet achat pouvait inclure un bien pour habitation propre, mais aussi une seconde résidence ou un bien d’investissement. Mais le gouvernement Arizona est actuellement en train de limiter ces possibilités à la seule résidence principale ou au financement de travaux pour ce même bien.»
« Une autre possibilité reste d’utiliser l’EIP comme garantie pour un achat immobilier. Par exemple pour un prêt bullet : ce prêt permet de mettre en gage l’EIP en constitution, et de rembourser le capital emprunté en une fois à l’échéance (les intérêts étant, eux, payés chaque mois). »
Par ailleurs, l’EIP offre la possibilité d’investir en branche 23 via une architecture ouverte de fonds, pour tout ou partie des primes versées (alors que la PLCI, elle, se limite généralement à des placements en branche 21).
En résumé, l’EIP est un outil extrêmement efficace pour optimiser la pension complémentaire via une société, mais aussi pour :
Cependant, son intérêt dépend étroitement de la manière dont la rémunération du dirigeant est structurée, ainsi que des autres mécanismes mis en place par le dirigeant pour préparer sa pension.
« L’EIP peut transformer la manière dont un dirigeant prépare son avenir financier », conclut Lara Balot, « mais il ne faut pas oublier que c’est un des éléments d’une planification patrimoniale globale, qui fait intervenir le patrimoine de la société et le patrimoine privé, comprenant par exemple des placements boursiers, du crowdlending, de l’immobilier, et plus encore. L’important est que la stratégie globale soit cohérente avec les objectifs du client, équilibrée et diversifiée. », conclut Lara Balot.
En conclusion, la règle simpliste « toujours commencer par une PLCI » n’est pas universelle. Pour l’indépendant en personne physique, la PLCI reste indispensable. Pour le dirigeant de société qui remplit les conditions, la priorité sera souvent donnée à l’EIP, car il permet d’épargner et d’investir des montants beaucoup plus importants.
Comme l’explique Lara Balot : « Parfois, par exemple quand on passe en société, il vaut même mieux suspendre la PLCI que l’on avait commencée en personne physique, pour laisser plus de place à l’investissement dans un EIP. »
Dans certains cas, il peut aussi être opportun de revoir sa rémunération pour rendre l’EIP intéressant. Et si le dirigeant ne se trouve pas dans les bonnes conditions pour bénéficier de l’EIP, il peut toujours garder ou commencer une PLCI.
« Mais chaque situation doit être analysée. C’est là que le conseil personnalisé prend tout son sens », conclut Lara Balot.
Choisir entre une PLCI et un EIP ne se résume donc pas à comparer deux produits financiers. Tout dépend du statut, du revenu et des projets de chaque indépendant. Aucune solution n’est universelle : la clé est d’analyser chaque situation dans son ensemble, en tenant compte à la fois de la fiscalité, de la structure juridique et de la planification patrimoniale.
Chez VIP Conseil, nous analysons avec vous les différentes options et, en complément, faisons appel à des experts spécialisés comme Agifin pour ainsi associer une expertise comptable et fiscale de terrain à une vision patrimoniale indépendante.
Critère | PLCI (Pension Libre Complémentaire pour Indépendants) | EIP (Engagement Individuel de Pension) |
Qui peut souscrire ? | Tous les indépendants (en personne physique ou dirigeant avec société) | Uniquement les dirigeants de société qui se versent un salaire régulier |
Paiement des primes | En privé ou via la société en contrepartie d’un ATN | Via la société |
Pilier | 2 | 2 |
Plafond annuel | ± 4.000 – 4.600 € (2025) | Variable selon la règle des 80 % |
Avantage fiscal | Déductible à l’IPP + réduit l’assiette de calcul des cotisations sociales | Déductible à l’ISoc (charges professionnelles) mais pas à l’IPP |
Taxe sur les primes | ❌ Aucune | ✅ 4,4 % sur les primes |
Taxation à la sortie | Cotisation dites « INAMI » 3,55 % + solidarité (0–2 %) + taxation via “rente fictive” (pendant 10 à 13 ans en fonction de l’âge auquel on touche le capital) | 10 % + INAMI 3,55 % + solidarité (0–2 %) = anticiper un total d’environ 15% si les capitaux sont perçus à 67 ans |
Options spécifiques | Version “sociale” avec couvertures complémentaires | Possibilités de back-service (jusqu’à 10 ans de rattrapage), d’avance immobilière ou garantie immobilière, ou de couvertures complémentaires (revenu garanti, couverture décès, etc.) |
Liquidité | Bloquée jusqu’à la pension (avance immobilière possible mais peu fréquente car montants moins importants | Bloquée jusqu’à la pension (sauf si avance immobilière) |
Rendement | Généralement faible (branche 21 : 1–2 % + participations bénéficiaires), mais avantage fiscal immédiat | Dépend du contrat (branche 21 garantie ou branche 23 en fonds d’investissement) |
Intérêt principal | Outil simple et accessible pour les indépendants en personne physique | Outil puissant pour les dirigeants en société avec revenus réguliers |
Limites | Plafond bas, capital final limité, non liquide | Nécessite d’être en société, un salaire régulier, taxe 4,4 %, complexité de la règle des 80% qui demande une analyse annuelle des limites des montants à investir |